Pourquoi choisir un capteur monochrome ?

Monochrome
Monochrome

Je vous conseille de télécharger mon petit guide sur la photographie noir et blanc en numérique (colonne de droite ou en-dessous cet article).
On me pose régulièrement les mêmes questions au sujet de l’achat d’un appareil numérique doté d’un capteur monochrome, c’est-à-dire un capteur dédié exclusivement à la photographie en noir et blanc, sans possibilité de prise de vue en couleur.
Je vous propose donc d’en résumer ici les avantages et les inconvénients.
Ces appareils sont dépourvus de matrice de Bayer et ne restituent, par conséquent, aucune information chromatique. Le capteur enregistre uniquement la luminance de la scène, autrement dit les contrastes de lumière, ce qui constitue la base même de l’image en noir et blanc.

Avantages d’un capteur monochrome :

  • On peut monter à de très hautes sensibilités (25.000 / 50.000 iso suivant les appareils) sans apparition de bruit numérique gênant. LUn capteur monochrome présente généralement un bruit perçu plus faible qu’un capteur couleur, et ce pour plusieurs raisons techniques. Tout d’abord, un capteur monochrome est dépourvu de matrice de Bayer. Sur un capteur couleur, chaque photosite ne capte qu’une seule composante de couleur (rouge, vert ou bleu). L’image finale est ensuite reconstruite par interpolation (dématriçage). Cette opération accentue souvent le bruit chromatique, particulièrement visible dans les zones sombres. À l’inverse, sur un capteur monochrome, chaque photosite capte l’intégralité de la luminance. Il n’y a ni interpolation, ni reconstruction de couleur. Le signal est donc plus direct, plus pur, et le bruit est uniquement un bruit de luminance, beaucoup plus discret et naturel à l’œil. Ensuite, l’absence de filtres colorés au-dessus des photosites permet à davantage de photons d’atteindre le capteur. Le rapport signal/bruit est ainsi amélioré, notamment en hautes sensibilités. À ISO équivalent, le capteur monochrome exploite mieux la lumière disponible. Enfin, le bruit en noir et blanc est perceptuellement moins gênant que le bruit chromatique. Il s’apparente davantage à un grain argentique, ce qui le rend visuellement plus acceptable, voire esthétique, dans une image monochrome.
  • Il n’y a pas de moiré (ou très très rarement). Pourquoi ? Parce que l’on évite l’échantillonnage des fréquences RVB (rouges, vertes et bleues) qui apportent parfois du moirage.
  • La photo gagne en précision ! la texture est plus fine. Certaines marquent annoncent plus de 60% de définition en plus. Pourquoi ? pour la même raison que pour la première affirmation, mais aussi car sur les capteurs monochromes il n’y a pas besoin de filtres anti-moiré (filtre passe-bas) qui engendre un léger flou.
  • La plage dynamique est plus importante dans les basses lumières. On gagne en détails et en ‘visibilité’ dans les basses lumières.
  • Plus de nuances, plus de précision et donc je trouve que l’on gagne en volume, en effet 3D…

10 000 ISO (Leica M246)…aujourd’hui on arrive à 25 000 iso avec ce rendu avec un M11 Monochrom ou un Leica Q3 Monochrom

Inconvénients d’un capteur monochrome :

  • On est condamné à faire du noir et blanc, et même si cela peut paraître évident, certains finissent par craquer et revendre leur matériel. Tandis que des appareils avec capteur numérique avec matrice colorée peuvent eux faire du noir et blanc.
  • Moins de tolérance dans les hautes lumières, une fois que c’est blanc (cramé, écrêté) impossible de revenir en arrière, on n’a plus aucune information. Il est donc nécessaire de sous-exposer la scène, ou exposer pour les hautes lumières. Travailler avec un capteur numérique monochrome c’est un peu comme faire de l’inversible (diapositive) : pas le droit à l’erreur !
  • Trop sous-exposer n’est pas bon non plus ! en effet, en sous-exposant pour conserver les hautes lumières, on dégrade les basses lumières et en les ‘relevant’ on peut voir apparaître du banding et du bruit.
  • On ne peut pas jouer sur les différentes longueurs d’ondes. C’est-à-dire foncer le bleu d’un ciel, éclaircir un vert, etc. Il est nécessaire de filtrer (ajouter un filtre de couleur physiquement à la prise de vues). Le rendu est donc plus ‘plat’ qu’une image issue d’un capteur coloré convertie en noir et blanc avec la retouche des courbes RVB.
  • De part mon expérience : les capteurs monochromes sont plus sensibles à la rayure lors des dépoussiérages.

Banding et surexposition

Conclusion

Sauf si vos moyens le permettent, l’achat d’un appareil équipé d’un capteur monochrome mérite une réflexion approfondie. Ce type de capteur est très spécifique : contrairement à un capteur couleur, avec lequel on peut ensuite convertir en noir et blanc, un capteur monochrome ne permet pas de restituer la couleur. Contrairement à l’argentique, vous ne pourrez pas vous dire « aujourd’hui je prends une pellicule couleur pour photographier un feu d’artifice à Disneyland ». De même, il ne sera pas possible de retravailler facilement les contrastes en post‑production, d’assombrir ou d’éclaircir certains éléments de l’image comme on le fait avec un fichier RVB. Avec un capteur monochrome, vous devez prendre vos décisions au moment de la prise de vue : choisir la correction appropriée et appliquer physiquement le filtre adéquat. Personnellement, je ne pourrais pas me limiter à un seul appareil monochrome, même si mes images sont à 80 % en noir et blanc. Un appareil monochrome représente une véritable démarche de puriste. Ce n’est pas un choix à prendre à la légère, ni un simple effet de mode : c’est avant tout un choix de rendu et de démarche photographique.
J’ai remarqué chez mes élèves que le passage au capteur monochrome fait souvent suite à une pratique argentique noir et blanc abandonné (pour tout un tas de bonnes ou mauvaises raisons), mais aussi le prélude à une activité argentique, en effet beaucoup de mes élèves ont commencé par un capteur monochrome et sont aujourd’hui à la pellicule argentique noir et blanc.

Monsieur Noir & Blanc (Yann MATHIAS)

Retrouvez toues articles classés sur le noir et blanc : https://yannmathias.fr/liens-articles-noir-et-blanc/

4 Comments

  1. Bonjour Yann,
    Il conviendrait de mentionner le cas particulier des appareils Pixii, proposant non pas un capteur monochrome mais un « fonctionnement bimode », un logiciel traitant les infos issues du capteur de manière à ne conserver que les données de luminance. Il ne s’agit donc pas d’un « conversion » des couleurs selon un profil défini pour générer un JPG. On obtient donc des DNGs monochromes tout en conservant la possiblité d’en réaliser en couleur. J’ai réalisé des tests en comparant des clichés couleur convertis en N&B et des clichés mono « natifs ». On voit la différence avec plus de détails dans les basses lumières.

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